Anna Maria Guasch

so 1467378181235 SO | 2021-01-16 07:52

Une des caractéristiques notables de la trajectoire d’Anna Maria Guasch réside dans son approche inclusive et dans le traitement rigoureux qu’elle consacre à l’ana-lyse des manifestations artistiques. Son parcours académique l’a ame-née à vivre dans différentes villes (Bilbao, Séville, Madrid, Barcelone), ce qui représente certainement un avantage dans un pays sujet à la di-versité culturelle comme l’Espagne.Sa carrière dans le domaine de la recherche commence en 1985 avec une étude intitulée Arte e ideo­logía en el País Vasco, 1940­1980 [Art et idéologie au Pays Basque, 1940-1980] (Madrid: Akal, 1985), à une époque où l’Espagne avançait vers la démocratie et s’éloignait des sinistres empreintes du fran-quisme, mais aussi à une époque où la recherche en l’histoire de l’art était rare. Sans aucun doute, ce livre propose la toute première observation de cette production artistique aux particularités singu-lières. Nourrie par sa connaissance de la réalité basque, elle a entrepris une enquête, avec la collaboration de Joseba Zulaika, sur l’impact médiatique, culturel et politique de la construction du Guggenheim. Le résultat de ce travail fut publié dans l’ouvrage qu’elle a dirigé: Learning From the Bilbao Guggenheim (Reno: Center for Basque Studies, Univer-sity of Nevada, 2005).

En 1997, en bouleversant l’orientation fondamentale de sa trajectoire, elle fit un saut historiographique significatif en misant sur la production de sens issue non plus d’une analyse des œuvres d’art, mais des expositions en elles-mêmes et des discours qui s’y rattachent. Il faut souligner qu’à ce moment-là les études curatoriales n’existaient pas encore au niveau international; son mérite en est d’autant plus considérable. Ses recherches ont trouvé un prolongement dans Los Manifiestos del arte posmoderno: Textos de expo­siciones. 1980­-1995 [Les Manifestes de l’art postmoderne: textes d’expositions, 1980-1995] (Madrid:Akal, 2000). Cette anthologie de textes d’expositions thématiques révèle clairement la «conscience d’une époque». En ce sens, il était crucial de connaître de première main les idées de quelques figures éminentes de la théorie de l’art (Benjamin H. D. Buchloh, Douglas Crimp, Rosalind Krauss, Hal Foster, Griselda Pollock), raison pour laquelle elle décida d’utiliser le format de l’entretien pour atteindre le cœur de leur pensée dans La Crítica dialogada [La Critique dialoguée] (Murcie: Cendeac,2006).

Malgré un travail infatigable à l’Université de Barcelone, Anna Maria Guasch a aussi développé l’exercice de la critique d’art en suivant de près l’actualité des expositions. Mais sans doute sa plus grande réussite se trouve-t-elle dans le champ de l’histoire de l’art, discipline qui lui a valu ses plus grandes reconnaissances. Les seize éditions d’El Arte último del siglo XX: Del Posminimalismo a lo multicul­tural. 1968­1995 [L’Art final du XXesiècle: du Postminimalisme au multiculturel, 1968-1995] (Madrid: Alianza Forma, 2000) en sont la preuve. Cette étude montre ses vastes connaissances et demeure une lecture obligée dans les universités espagnoles et latino-américaines. Nous recommandons aussi fortement Arte y archivo, 1920­2010: Genealogías, tipologías y discontinuidades [Art et archive, 1920-2010: généalogies, typologies et discontinuités] (Madrid: Akal,2011). Dans une histoire à caractère archéologique, les relations entre art et archive se tissent et soulignent la valeur paradigmatique de l’archive comme système d’analyse des artistes visuels qui ont inventorié des registres, tout en explorant ainsi les capacités mnémotechniques de l’art.

Bien plus encore et dans sa production la plus récente, nous renvoyons le lecteur à El Arte en la era de lo global, 1989/2015 [L’Art à l’ère du global, 1989/2015] (Madrid: Alianza Forma, 2016)1. Anna Maria Guasch y montre son œil expert en soulevant une problématique qui exige une perspective précise et ambitieuse.

Juan Vicente Aliaga Traduit de l’espagnol par Julián Medrano Hoyos